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Photo du rédacteurMaud Rusk

Il est grand le mystère de la foi - Le chocolat est juste et bon

Dans ce billet, je présente ma relation affective et intellectuelle avec le chocolat à travers la fête de Pâques, le chocolat Bean-to-bar, le deuil et la rencontre avec les mots de l'auteure Hélène Dorion, qui tout ça, fondu ensemble, créé pour moi de l'espoir et une sorte de résurrection. Il est grand le mystère de la foi. Le chocolat est juste et bon. Joyeuses Pâques les amis.


Il y a des tonnes de pages Internet bourrées de références pour découvrir des chocolateries, toutefois, c’est davantage mon lien passionné avec l'aliment que je désire aborder.


Avec un peu de recul (et d'honnêteté), je me rends compte que le moindre prétexte est bon pour parler de ma mère. La mort de maman est difficile. DIFFICILE. DiY-PHI-cil, Dee-FI-sceal. Es difìcil. Es ist schwierig. Le chocolat me fait beaucoup penser à elle.


Ça fait un moment que j'ai publié mon dernier billet. Presque deux mois en fait. J'aimerais développer une plus grande cadence, mais pour l'instant, c'est ainsi. Ne me lâchez pas ! J'ai commencé un nouveau travail et je participe à un groupe d'accompagnement pour personnes endeuillées. J'y ai carrément vomi mes tripes (au sens propre comme au figuré). Tout ça est très riche, mais exigeant. Je vais m'ajuster.


Surtout, l'écriture de ce billet contribue à la recherche de sens qui m’habite. Les bons mots ont pris du temps à se présenter à moi. 



Fondue au chocolat


Deux jours avant son décès, notre mère a voulu manger une fondue au chocolat. Nous n'avons pas eu le temps de la lui offrir. Faut-il que les saveurs du chocolat soient puissantes pour qu'une personne en fin de vie émette le souhait de manger une fondue au chocolat. Ce rituel lui rappelait peut-être les moments où la crème 35 et le chocolat Toblerone nous régalaient les samedis soir de notre enfance. Au lendemain de sa mort, ma sœur et sa famille en dégustaient une à sa santé.


La Fête pascale et son bonheur en lécithine*


Les matins de Pâques étaient quasiment aussi excitants que ceux de Noël. Durant plusieurs années, maman Ginette organisait une chasse au trésor le dimanche de Pâques. Sur la table de cuisine, qu'elle avait soigneusement décorée la veille, trônaient de gros lapins ou poules en chocolat. En me couchant, je rêvassais à la grosseur de la pièce de chocolat.


La chasse se faisait à l'intérieur. La consigne était de dénicher les œufs à notre hauteur. Ils étaient cachés dans les pots des plantes, entre deux craques du divan ou en dessous des coussins des chaises de cuisine. À hauteur d'enfant, nous n'avions jamais à grimper sur les comptoirs pour les trouver. Ce sont des souvenirs impérissables.


Vous souvenez-vous des boîtes dans lesquelles les chocolats étaient emballés dans les années 80 ? En rangeant les choses de ma mère après son décès, j'ai trouvé une de ces boîtes. Elle y conservait ses BEAUX lapins de Pâques. Cela me fait tellement sourire.


Boîte de chocolat de Pâques Vintage

LA MINUTE CONNAISSANCE


*Qu'est-ce que la lécithine ?


Le chocolat fin me donne de l'exaltation, mais je dois avouer qu'à Pâques, je ne rechigne pas sur le chocolat commercial riche en gras, en sucre et en lécithine.


*La lécithine est une matière grasse qui joue un rôle d’émulsifiant. Le chocolat commercial est à base de beurre de cacao, de sucre et de lait. Faisons ici un peu de chimie : le lait et le sucre sont aqueux, alors que le beurre de cacao est un lipide. Comme l’eau et l’huile, ces matières ne sont pas miscibles, autrement dit, elles ne peuvent se mélanger. La lécithine fait en sorte de fixer le sucre et le lait au beurre de cacao. Elle permet de donner une meilleure apparence et une durée de conservation plus longue. Le chocolat artisan, souvent, ne possède pas ce liant parmi ses composantes.

Je ne suis pas experte en lécithine, alors c'est ici que se termine cet exposé.


Gourmande ? Moi ?




Début du raffinement


Plus jeune, je regardais assidument ce livre de recettes de la marque de chocolat Baker's. C'était quasiment pour moi un livre de contes de fées. Il me faisait rêver.


Livre de recettes de chocolat Baker's datant des années 80

Adolescente, le chocolat continue de me fasciner. Je dévore des livres sur le sujet comme ceux de la belle Irlandaise, Trish Deseine, Christophe Felder ou le Larousse du chocolat. Je découvre le vocabulaire associé : cristallisation, chocolat de couverture, conchage, les origines, etc. J'essaie (le plus souvent possible) de mettre en application ce que j'apprends.


Recettes réalisées à diverses époques (2004 à 2022)


J'adore voir l'état du chocolat se modifier. J'aime étudier sa brillance et découvrir si sa cassure est nette. Si le chocolat est de bonne qualité, le bruit qu'il fera en cassant sera sec. Si c'est le cas, cela indique une composition équilibrée dans ses matières premières. J'ai souvent de la difficulté à le travailler de façon plus professionnelle, car cela prend une surface appropriée pour le manœuvrer (souvent du marbre), des moules particuliers et un savoir-faire que je ne possède pas encore.


Autrefois, je dis bien autrefois, j'avais de la difficulté à trouver au Québec du chocolat qui me surprenait les papilles. C'était donc en voyage que j'en profitais pour découvrir de grands chocolatiers.


Sac de la chocolaterie Patrick Roger il y a 24 ans

Le vestige de mon premier achat français est un sac de la chocolaterie Patrick Roger. Ce souvenir date de 22 ans maintenant. C'était ma première fois à Paris.


Arrivée devant la boutique du huitième arrondissement, je figeai alors un peu en me demandant si ce lieu était fait pour une jeune habillée « toute de travers » avec son énorme sac à dos. Peu importait mon accoutrement de voyageuse, j'entrai dans le luxueux commerce et je payai les 65 euros pour mon assortiment de ganaches et pralinés. L'investissement fut judicieux, car le souvenir est mémorable et toujours porteur du rêve de pratiquer un jour la chocolaterie.


Patrick Roger ancre sa démarche aussi dans la pratique des arts visuels. Ses sculptures en chocolat, ils les magnifient par la suite dans le bronze, le marbre ou le béton. Petites ou gigantesques, ses œuvres sont exposées avec des artistes comme Soulages, René Magritte ou Horoshi Sugimoto.


« Sculpter. Un peu. Beaucoup. Tous les jours. Passionnément. Sculpter comme on respire. Comme on écrit. Pour montrer. Questionner. Dénoncer. Avec ses doutes. Ses peurs. Ses envies et ses fantasmes. Mais toujours sculpter. »

Patrick Roger

On visite son site web comme on se perd dans une galerie d'art ou sur une route de campagne. C'est doux, c'est bucolique, c'est intense. Le vent et la beauté en plein visage. Le cœur en poésie et le corps en besoin de s'exprimer.


C'est avec ce dernier que j'ai connu l'association des Meilleurs Ouvriers de France, qui, chaque année, souligne la passion et l'excellence d'artisans de différents corps de métiers en passant par la taxidermie, la coutellerie ou la chocolaterie. C'est par les MOF que j'ai découvert d'autres pâtissiers et chocolatiers d'exception comme Jacques Genin ou Alain Ducasse. Qu'on se le dise, le « plafond de cacao » si vous voyez ce que je veux dire, semble encore loin d'être brisé . À quand les grandes chocolatières MOF de ce monde ?


Bean-to-bar ou de la fève à la tablette


Les modes de culture du cacao, comme dans plusieurs grandes industries, ne sont pas toujours ce qu'il y a de plus éthique et équitable. Je ne suis pas une experte en la matière, donc je ne peux apporter un éclairage précis sur le sujet, mais mon billet me donne envie d'explorer la situation.


L'appellation Bean-to-bar ou de la fève à la tablette propose toutefois une alternative intéressante pour consommer du chocolat de façon plus responsable. J'ai découvert cette fascinante approche il y a quelques années.


Sans mauvais jeu de mots, je « craque » littéralement sur les palettes Bean-to-bar. Il y a un mois, j’ai visité État de choc, qui se trouve au 6466, boulevard Saint-Laurent, à Montréal. JOIE PURE. C'est un lieu parfait pour découvrir ce qu'est le Bean-to-bar. Merci les filles pour l'accueil. Ils ont des chocolats propres à leur marque, mais aussi des sélections de tablettes provenant du Québec, du reste du Canada et de partout dans le monde. Ces tablettes sont fabriquées en quantité limité. Les façons de faire sont plus équitables (proximité avec les producteurs, pratiques écoresponsables et plus éthiques quant aux récoltes...) et le chocolat n'a pas mille et un ingrédients. Les barres peuvent coûter entre 5$ et 22$, mais nul besoin de se gaver avec une telle qualité. L'expérience en vaut le prix et ce dernier fait écho aux valeurs d'une activité tenant compte du développement durable.


Graines de cardamome verte
Graines de cardamome verte

Depuis cette virée, mes sens virevoltent dans un chaos magnifique. La cardamome m'envahit avec la barre de Mirzam Chocolat. Ça goûte aussi un brin les dattes. Si votre écran était scratch and sniff, vous seriez épatés autant que moi. Une des tablettes de la chocolaterie Pump Street (en Angleterre) goûte le « surdough » ou le levain. C'est comme manger un bout de baguette grillée avec du beurre quand tu as faim. Satisfaisant, non ? Ça me fait penser à la vieille pub de @Snickers qui dit «T'es pas toi quand t'a faim».





Jusqu'ici, les dizaines de tablettes Bean-to-bar que je me suis procurée dans la vie avaient des emballages au design soigné et recherché. Certaines sont tout simplement des œuvres d'art. Voir plus bas celle de marque To'ak des iles Galapagos avec la tortue en patchwork.


Vous aimeriez que je continue à vous faire découvrir de tels chocolats ? Écrivez-moi à info@maudrusk.com pour me dire si vous aimeriez participer à une dégustation de chocolat Bean-to-bar



Un peu de recherche m'amène à des noms de chocolatiers qui me sont inconnus et qui résident dans des pays dont j'aimerais bien visiter le territoire comme l'Islande (Omnom chocolat) ou l'Irlande (Skellings Chocolate) et en Écosse dans les Highlands (Cocoa Moutains). On y prend là-bas, paraît-il, le meilleur chocolat chaud du monde. C'est situé à deux pas de Fraserburg, une bourgade écossaise visitée il y a 25 ans et qui me fait encore rêver par sa rusticité et sa mer du Nord déchaînée. J'y avais travaillé un mois dans une usine de transformation de saumon. J'étais sur la chaîne de montage des planches de saumon fumé. J'aime me souvenir qu'elles étaient destinées aux chic établissements de Fortnum & Masson à Londres. Il fallait peser chaque tranche de saumon au milligramme près. Je m'étais fait demander en mariage trois fois durant ce mois par des travailleurs sans papier.


Revenons au chocolat


En matière de Bean-to-bar, le Québec n'est pas en reste avec des entreprises comme Palette de Bine (Mont-Tremblant), Quantu (Montréal) ou AVANAA (Montréal) et autres. J'écrivais plus haut qu'il y a peu de chocolatières, MAIS les délicieuses créations de Palette de Bine sont faites par l'inspirante Christine Blais. Dans cette vidéo, la chocolatière parle ici de la fève à la tablette mieux que je ne pourrais le faire. Au plaisir d'aller vous rencontrer Christine. J'ai même très hâte de le faire.


Je ne peux passer sous silence le succès (mérité) de Chaleur B, un chocolatier situé à Carleton-sur-Mer en Gaspésie. Le chocolat au lait (biologique) de Dany Marquis a été sacré le meilleur au monde en décembre dernier. Avec cette reconnaissance de l’International Institute of Chocolate and Cacao Tasting, il vient d’entrer dans la ligue des meilleurs fabricants de chocolat au monde. Imaginez-vous donc que ce dernier est en rupture de stock depuis un moment.


Poésie de la bine


Ce que j'aime de l'écriture des billets jusqu'ici, c'est que les conclusions m'amènent là où je n'avais pas idée au départ. Ce court récit me confirme que j'aimerais aller à la rencontre de producteurs de cacao et faire la visite de diverses plantations à travers le monde. Par ailleurs, je pourrais commencer par prendre la route et aller dans le Nord de Montréal ou à Carleton-sur-Mer pour rencontrer ces beaux indépendants du chocolat. Pour le reste, L'Équateur ou le Madagascar n'ont qu'à bien se tenir !


Je cherche comment terminer ce billet depuis des semaines. J’y vais avec une poésie spontanée. Est-ce l'influence de la nuit de la poésie qui s'est tenue la semaine dernière, la remise du Prix de poésie Geneviève Amyot dont ma belle amie Renée Laberge est un coup de coeur cette année ou encore, le spectacle de David Gaudreault * écouté la semaine dernière sur OHdio en mangeant des biscuits au chocolat cuisinés avec ma belle-sœur ?



 

Renard roux, roux comme la fève de cacaoyer torréfiée

Pas tout à fait brûlée comme mon bonheur maternel

Brulées, les chances de voyager avec toi, maman, vers les Grands bancs de Terre-Neuve

Où j'aurais aimé t'amener prendre le thé aux bleuets Dark Tickle avec une gaufrette au chocolat que tu aimais tant. Celle-là même que tu offrais à grand-maman.


Dans d'autres vents, je reverrai peut-être ta bine

En Écosse, au coin de Quarry Road, j'irai marcher et mordre les rafales à m'en étouffer

Toujours en choc, je suis, plantée au milieu de partout et de nul part.


J'ai peur à Pâques que le bacon et la tarte jardinière goûtent l'injustice de ton absence

La lécithine et les cocos n'arriveront pas à me réconforter

Puissent les dahlias, le blush des roses et le myosotis t'envelopper encore de douceur

Dont tu as su si bien nous entourer.


Initiales de Maud Ruysk - La Renarde



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Devenir adulte


Pâques était la célébration préférée de notre mère Ginette Falardeau. Merci à mes sœurs et à mon chum qui sont là, toujours là, le cœur aussi meurtri, mais ouvert au partage et à la communion comme l'aurait aimé maman. Merci à mes précieuses amies (à toi aussi Louise) de mon groupe de deuil. Vous faites partie de ma vie maintenant. J'ai beaucoup de reconnaissance pour votre générosité.


En écoutant le spectacle du poète-slameur-brillant-bo-gosse-qui-fait-du-bien*, j'ai ressorti plusieurs poètes de ma bibliothèque. Je suis tombée sur le récit d'Hélène Dorion RECOMMENCEMENTS. Je l'ai depuis 7 ans. J'avais commencé à le lire, mais le récit à propos du deuil de la mère de l’auteure m’arrachait les entrailles. Maman venait de nous annoncer son premier diagnostic de cancer.

Je l'ai dévoré en quelques heures. J'ai trouvé dans ce récit, des mots qui me feront aller au-delà de l'absence et plus loin que la douleur. Je n'y croyais plus. J'aimerais vous partager la puissance des 211 pages, mais je choisis cet extrait qui relate une chose vite ressentie après avoir accompagné maman dans les derniers moments de son corps physique, le fait que je ne serais plus une enfant, que désormais, je n'avais plus de parents.


Je crois que de ne plus exister dans les yeux de la personne qui m'a mise au monde et qui me vouait un amour inconditionnel, me fait peur. C'est en partie par cette rupture que le recommencement devient possible selon l'auteure Hélène Dorion.

Le dernier brunch de Pâques de notre mère le 9 avril 2023
Le dernier brunch de Pâques de notre mère

En m'offrant d'accompagner sa mort, ma mère m'avait initiée à une part de la vie autrement inaccessible. Et elle me donnait la vie de nouveau, une vie d'adulte cette fois, libre du témoin de ses heures. Le temps qui a passé m'a révélé la profondeur de la liberté qui, à ce moment précis, m'a été accordée, et que j'ai apprivoisée peu à peu, en même temps que le vertige venu de la rupture des amarres qui me reliaient à ce quai qu'est notre mère, qu'est notre père.


La seule pensée de notre mort constitue l'invitation la plus pressante à vivre. Elle peut en effet nous pousser à ne jamais nous contenter de rester à la surface ou en périphérie de l'existence et nous donner l'élan pour habiter pleinement le monde. La mort invite à rejoindre sans délai la vie même, à travers son éblouissant mystère.*


Dorion, Hélène, « L'ultime connaissance », Recommencements, (ed.) Druide, Montréal, 2014, pp.128-129.


*Reproduit avec l'aimable permission des Éditions Druide.


Puisqu'on parle d'état de choc, d'état du chocolat qui se modifie, j'apprends que les étapes du deuil n'ont pas toujours de la lécithine pour que celles-ci se mélangent parfaitement à nos vies. Des fois, ça va et il y a le calme. Des fois, c'est la galère et la tempête revient. C'est pour ça qu'il est grand le mystère de la foi.


Je trouve heureux d'avoir lu Hélène Dorion avant Pâques. C'est maman qui a dû guider ma main sur ce récit, de sorte à ce que je puisse vivre mon premier Pâques sans elle dans la lumière et non dans le tourment que son vide me laissait jusqu'ici.


Voyez comment le chocolat est histoire de beauté et d'apprentissage. Ces quelques lignes à priori, sur le chocolat m'auront permis de toucher à ma propre histoire de recommencement.


Gratitudes chocolatées xxx


 


Si la perte d'un être cher est difficile, ne restez pas seuls. Des ressources existent.


Suivi de deuil de la Maison Michel-Sarrazin https://michel-sarrazin.ca/soutien-aux-proches-centre

Albatros capitale-Nationale https://albatrosquebec.ca/


Ou faites le 211 pour connaître les organismes de votre région.





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2 Comments


denyse.villeneuve
Mar 31

Chère Maude,

La lecture que je viens de faire est tout à fait rafraîchissante !!! J’aime le chocolat pour m’en confesser… Merci pour ce partage.

Denyse

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Carolyn Guay
Carolyn Guay
Mar 29

L’invitation la plus pressante à vivre ! Quelle écriture ♥️ je t’aime ma belle amie

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